Un soir au bel "Arsenal" de Metz.

Joëlle Léandre Tentet « Can You Hear Me »

Arsenal de Metz Jeudi 29 janvier 2015, 20h

Femme contrebassiste, pourvoyeuse d’envies, d’énergies, d’incandescences, de générosités. Femme du free, guerrière pourfendeuse de frontières et de carcans, guêpe grondeuse. Grave, gaie, grinçante, compositrice, improvisatrice, le tout intimement lié pour le théâtre, la danse, les musiques, flingueuse d’habitudes par ses coups de gueule. Remise en cause pertinente, là où ça vous titille, refus du tourner en rond. Contrebassiste-femme certes mais avant tout musicienne curieuse qui a croisé nombre de compositeurs, de musiciens, de créateurs. En quelques mots depuis quarante ans : artiste sans œillères engagée dans ses époques…

Joëlle Léandre à CultureJazz on connaît bien. Louons donc son esprit libre, qui la fait osciller entre la recherche d’une écriture catalyseur d’improvisations et celle d’improvisations qui bousculent l’écriture. Seul quelques classiques coincés ou jazzeux grincheux, embourbés dans l’histoire, pourraient la trouver irrévérencieuse mais pas ceux qui, comme nous, sont tentés par l’aventure poétique.
Ce soir au bel Arsenal de Metz, jeu de cartes, jeu de lumières, d’ombres et de sons, d’ordonnancements subtils, ça balance et Joëlle de nous proposer avec Can You Hear Me une œuvre-manifeste, ouverte, en perpétuel mouvement autour de la note ré, sorte de bourdon sur lequel vient s’enrouler la musique.

Ce work in progress, sonne comme un refus de hiérarchiser, un appel au vivre ensemble, une conception de la musique qui veut que chacun soit avant tout un créateur pourvoyeur d’idées. L’écriture est là pour réaliser ce subtil alliage fusionnel. Et Joëlle de faire appel à quelques jeunes musiciens des plus représentatifs de la scène actuelle et quelques anciens compagnons tous rompus aux multiples techniques instrumentales de la musique contemporaine et prompts en jazzmen/women qu’ils sont, à les insérer dans leurs improvisations. En artiste d’expériences, elle fait se croiser ses propres souvenirs : un trio par ci, un quartet par là, un moment choral, d’autres chambristes, des scintillements sonores, des unissons mélodiques et rythmiques, des murmures, des jouets comme pour nous rappeler que tout cela est fait certes sérieusement mais sans trop de sérieux et qu’il est bon de se laisser aller. Les voix du tentet deviennent fluides et libres, ça coule de source, on rit sous cape, quelques clins d’œil, des signes complices traversent l’ensemble pour quelques rendez vous musicaux et du plaisir que diable ! De la sensibilité sans pathos émotionnel. Jusqu’au final, fil sans fin durant lequel, lentement avec douceur, poème, sons et lumière viennent graviter, s’étreindre et s’éteindre autour du ré initial. Toi spectateur tu es pris à témoin, interpellé, montré du doigt. Graves, gais, grinçants, guêpes, guerriers sont la musique et les mots de Joëlle Léandre.

PS : Remercions encore l’Arsenal de Metz qui a su mettre à disposition son écrin pour la musique du tentet de Joëlle Léandre et dans un même geste Thierry Bongarts Lebbe de Taklit Productions pour avoir rendu possible ce projet. Un nouveau CD sera disponible pour l’automne prochain chez Ayler Records.

Joëlle Léandre : contrebasse, composition, direction

Jean-Brice Godet : clarinettes, / Alexandra Grimal : saxophones alto et ténor /

Jean-Luc Cappozzo : trompette /
 Christiane Bopp : trombone / 
Théo Ceccaldi : violon
 / Séverine Morfin : alto / 
Valentin Ceccaldi : violoncelle / 
Guillaume Aknine : guitare électrique, / Florian Satche : marimba, xylophone, batterie, percussions.