LES ENCHANTEUSES 2015.

> le jeudi 16 avril 2015 :

  Claudia SOLAL - Benjamin MOUSSAY

Butter in my brain

Benjamin MOUSSAY s’assied devant ses claviers et commence à jouer. Une note, une seule note, la même ( the same one ) puis une seconde. À la quinte. Ta-ta, ta-ta. Il pourrait enchaîner direct sur Philip Glass, Einstein on the beach, le temps s’y prête.
Mais non.

Claudia Solal (2013)
© Florence Ducommun

C’est elle qui le rejoint.
Elle, Claudia SOLAL équipée de sa voix portative unplugged.
Elle entame « Among the pensive trees  ».
« Merde murmure mon voisin, c’est en anglais, ….., j’ai jamais tenté le TOEFL, trop dur ».
Il n’a pas tort mon voisin. Quand elle commence le second morceau par « Once upon a time »... comprendre Il était une fois ça va. Mais après, kecepastil ? Cette histoire de motherwarmness... sous-titré sur le mur du fond, ça aiderait. Du coup, le public, totalement saisi d’une transe collective ( mais pas communautaire) ne capte pas toutes les chutes, celle qui amènerait un sourire complice, une autre qui ferait glousser et d’autres menant au gros rire, au soupir, aux regards zémus, à la connivence.
Moussay campe le contexte de chaque chanson à l’économie, non non, pas en mode gestion étriquée ( un pupitre de trois violons ? Virez-en deux !! ), il fait dans l’économie de moyens raisonnée : un son suffit. Ce gars-là, on lui donnerait deux lattes de plancher, il en sortirait quelque chose de beau.
La voix et les claviers, comme l’incarnation sonore de la concision, de la clarté, de la netteté, de la précision, de la sobriété. Rien de trop, rien de moins. Juste ce qu’il faut. Une épure.
On entend The grass is greener, sans préciser si c’est dans le champ du voisin, Butter in my brain ( titre éponyme du CD pas encore enregistré ).
Solal cite Emily Dickinson qu’elle fréquente assidument depuis a long time ago.
Mon voisin cafouille, énervé par l’anglais : « encore une bretonne qui se la pète, elle est de Plozevet cette Émilie Dik Insonn’ » ( avec l’accent douarneniste ).
Suivent The house Jack built qui est trop petite, je voudrais plus de fenêtres, plus de lumière, pourquoi pas un penthouse pour tout le monde ? Il est sponsorisé par le Front de Gauche ou par Gaymard le concert ? Smokehouse on the ocean, chanson depressive sans refrain, puis Nightcaps for the sparrows ( de la roupie de sansonnet, du chouchen pour les mouettes ).
Sur la fin du concert, mon voisin en remet une couche en entendant l’annonce du morceau The weaver of doubt. « Tiens, qu’est-ce que je disais ? sûr que c’est une chanson trad’, allez, au pif, de Locronan. C’est plein de tisserands là-bas ».
On les rappelle, ils reviennent.
Of course.

Les enchanteuses, le festival des voix de femmes du monde - jeudi 16 avril 2015.
Le triton
11bis rue du Coq Français
93260 Les Lilas


> le vendredi 17 avril 2015 :

  Élise CARON - Louis SCLAVIS

Tandems

Élise Caron (2013)
© Florence Ducommun - 2013

Élise CARON, sa flûte traversière, ses trois micros et ses deux petites machines à bidouiller sa voix. Louis SCLAVIS, ses deux clarinettes et son jeu dramatique.
Direct aux tripes avec une intro qui n’est pas sans évoquer Arvo Pärt : un son filé chanté collé aux cimes du ciel que SCLAVIS orne de savantes broderies avec des jours ici et là, des à-plats, des volumes.
Le même voisin qu’hier murmure : « j’espère que j’ai bien fait de prendre Français première langue ».
Raté, camarade, t’aurais mieux fait de choisir gromelot en option. Car Élise s’y donne à fond pendant que SCLAVIS roule une pelle mahousse à sa clarinette basse qui a perdu son bec.
Inventifs, créatifs, innovants, on a beau les avoir entendus et ré entendus, la surprise est au rendez-vous et avec elle, l’humour, la joie, le rire, bref, toutes ces émotions que la belle musique nous offre. Ohé Valls et Macron, on en tient deux qui méritent le CICE et n’en détourneront pas l’usage comme certains, passés de la cupidité à la rapacité sans un friselis de honte.
Ils nous offrent quelques instants de répit en duo flûte-clarinette avec entre autres ce sublime thème encore et toujours d’actualité « dieu n’existe pas », une musique qui s’incruste comme une peau de saucisson entre les dents, tire toujours mon gars.
La bouche à mordre le micro, Madame CARON la joue soufi, façon dikr, une incantation inspirée pendant que lui, persévère dans le bouche à bouche sans bec. C’est l’printemps, vive le patin !!
Et, à partir d’un dialogue d’ivrognes bien murgés (« Où elles sont mes biscottes ? T’as fait quoi des allumettes ? ») ils se lâchent, ça sent la fin, déjà, comment ils font pour nous réjouir l’âme et les boyaux çacom’ ?
Merci vous deux, une tranche de bonheur dans ce monde qui se défait entre condition nucléaire et société de contrôle, ça a juste le goût de la vraie vie.

Quarte blanche à Louis Sclavis / Les enchanteuses, le festival des voix de femmes du monde - vendredi 17 avril 2015.
Tandem
Le triton
11bis rue du Coq Français
93260 Les Lilas