De la haute voltige pour un oiseau rare...

> Le Sunset. Samedi 16 mai.

Baptiste Herbin quartet. De la haute voltige pour cet oiseau rare qui d’emblée s’élance seul en « Chute libre » (morceau de son premier album « Brother Stoon » sorti en 2010). À dire vrai, je l’avais découvert sur Mezzo lors d’une retransmission de Jazz sous les Pommiers aux côtés de Stefano dI Battista et avais été époustouflée par la maturité de son jeu. J’avais donc hâte de pouvoir l’écouter en direct.

Lorsque ce moment arrive, c’est un peu comme une nouvelle rencontre, l’imprévisible dans l’immédiat, on est séduit ou pas. Or dès les toutes premières notes, je l’ai été, à l’instar du public. Un son rond, bien placé, une dextérité irréprochable. Le jeune saxophoniste est ensuite rejoint par la section rythmique, pas des moindres, avec Rémi Vignolo (batterie), Vincent Bourgeyx (piano) et Sylvain Romano (contrebasse). Jubilation littérale sous l’ étoile (« Kitana ko  », en malgache) ; les phrases se déroulent en souplesse tel un ruban velouté dans lequel on aimerait bien se lover, elles s’étirent grâce au souffle continu et fondent en douceur. Les notes mielleuses s’agrémentent d’une touche d’épices rendue par la maîtrise des suraigus et sons polyphoniques. Rien ne manque.

Il y en a même pour les amateurs de mythologie. La narration de« Pasiphaé » (la mère du Minotaure) nous fait fermer les yeux afin de mieux apprécier la plénitude sonore de l’alto parcouru par des doigts papillonnants (trilles) qui contrastent au solo appuyé de la contrebasse.

Avec« Entomology  », le batteur et le boppeur défient le métronome placé au plus haut tempo ; un clin d’oeil à Charlie Parker , ô combien étonné par l’ élévation de la lune (cf« How high is the Moon »). Rythme effréné mérite une pause mais en attendant B.H. dégaine son soprano : « Brother Stoon » . Digitalement , imaginez les virevoltes d’un colibri , c’est un peu cela... toutefois le pianiste mène la danse à la fin du morceau.

Les deuxième et troisième sets mettent à l’honneur plusieurs titres qui se trouveront sur le nouvel album à paraître prochainement. Notamment « Bedex »( un commune Belle iloise) ; les palabres de « Mio Vicino » ; un suave hommage à McLean «  Ballad for Jackie  » ainsi qu’une reprise de Joe Henderson « Punjab ». Ajoutons une autre paraphrase avec « My friends » ( non pas «  Just » !)... Aussi, en invité surprise une jeune chanteuse, Sarah Lancman, révélée au concours de jazz vocal de Montreux en 2012, qui de son timbre frôlant les graves interprète quelques standards (« Never let me go », « Love for Sale »).

Le leader semble puiser son énergie dans le sol afin de mieux négocier les aigus, il termine magnifiquement « River Man » de Nick Drake, mélange doré de coulées zéphyriennes...

Décidément, le jazz a encore de belles ailes à déployer.

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