Le 6 octobre 2015 à Reims.

Reims est un sacrée ville, non contente d’abriter un des plus beau édifice religieux qui existe dans ce bas monde, non contente d’être la ville des bulles, d’être pour le meilleur et pour le pire sur la route de l’histoire, d’avoir su résister à ses turpitudes, d’avoir vu passer les rois et Jeanne, la voilà à présent dotée d’un festival de jazz de 22 ans d’âge.

Uri Caine et Alain Vankenhove.
Reims Jazz Festival - 6 octobre 2015.
© Pierre Gros - 2015

Le bel âge pour une équipe en grande partie bénévole qui a su drainer un public régional passionné à l’écoute attentive et exigeante. Le festival doit certainement là sa survie dans des périodes difficiles économiquement : un refus de se laisser tenter par la facilité dans laquelle certains autres tombent, sorte de course à l’échalote, croyant naïvement tenir là la solution à leurs problèmes. Alors saluons l’intelligence, l’éclectisme et le courage, le sens de l’équilibre artistique de la programmation qui nous est ici proposée.
Bien qu’il ait éclairé nos âmes, le jazz a toujours aimé miser sur les endroits un peu troubles. Il faut dire aussi que fruit d’une alchimie venant, entre autre, de la mêlée nouvelle orléanaise, du vaudou, des bouges et des caves, il a de qui tenir ! Et quoi de mieux que de se retrouver là où le vin se fait, dans ces entrailles où la magie se lie au plaisir, venir ici s’encanailler, monde des bulles en fêtes chez Mumm. On profite alors de profondes alcôves lovées dans quelques schistes, une cave pour le concert inaugural du festival.

Point Of Views

Sébastien Boisseau et Alain Vankenhove.
Reims Jazz Festival - 6 octobre 2015
© Pierre Gros - 2015

Pour cette soirée, un nouvel ensemble de haut vol, Point Of Views, fruit de la rencontre d’Alain Vankenhove et du trop rare Uri Caine avec Jeff Ballard et Sébastien Boisseau. Une musique écrite en grande partie par Alain qui rappelle une esthétique issue de la fin des années 60, exigeante harmoniquement, des thèmes originaux aux mélodies jamais gratuites qui ne prennent nullement le pas sur un lyrisme ici à fleur de peau. Il faut dire que le trompettiste s’appuie sur une profonde connaissance musicale, un son charnu, plein et suave que l’on rapprocherait volontiers d’un Art Farmer, d’un Kenny Dorham ou encore plus d’un Lester Bowie pour la forme. On pourrait avoir de moins bonnes fréquentations n’est ce pas ? Et c’est avec une générosité non feinte, un engagement qui fait plaisir à voir (Alain, quand il n’a plus sa trompette aux lèvres, danse) et emporte l’adhésion que s’est déroulé l’ensemble de la prestation. Certes c’était là leur premier concert et l’on devine la dimension que pourrait prendre cette musique une fois les dernières inhibitions vaincues. Nous attendrons donc avec impatience l’enregistrement qui devrait nous être proposé à l’issue de cette tournée.

Sébastien Boisseau et Jeff Ballard.
© Pierre Gros - 2015

Au bout de la soirée, une dernière coupe nous permet de faire chavirer les bulles, de trinquer avec Jeff, Uri, Sébastien, Alain, de parler musique et vie. Et nous ne bouderons pas notre plaisir de revenir ici à Reims pour un festival plein de si prometteuses soirées.
Reims, ville reine a sacré le Roi Jazz ce soir, on en est à peine remis.

Point Of Views : Alain Vankenhove : trompette & buggle /
 Uri Caine : piano 
/ Jeff Balard : batterie 
/ Sébastien Boisseau : contrebasse
Caveau Mumm à Reims le mardi 6 octobre 2015 à 20h30

L’édition 2015 du Reims Jazz Festival se prolonge jusqu’au samedi 7 novembre.
Le programme est ici : www.djaz51.com/festival-2015

PS : Un grand merci à toute l’équipe du festival !