Un duo de choc, un duo de charme.

Si cette salle de La Renaissance n’a pas vocation à accueillir le seul jazz (le théâtre, l’humour mais aussi l’Orchestre Régional de Normandie classique y font bon ménage), elle nous réserve chaque année en ce domaine au moins un belle surprise. Ainsi la chanteuse Youn Sun Nah, il y a deux ans, Patrice Caratini en trio l’an passé (voir notre article du 25 février 2015 ) et cette saison, elle recevait le duo composé du saxophoniste Émile Parisien et de l’accordéoniste Vincent Peirani.

Soirée jazz au sens large du terme mais paradoxalement au sens le plus précis également.
L’instrumentation n’est pas banale, la formation pas davantage. Nul n’est besoin d’une configuration jazz typique pour que le swing naisse (y compris dans ses formes les plus retranchées ou à l’inverse les plus extrêmes), le duo soprano-accordéon le confirme avec brio.
Partis de thèmes de Sidney Bechet, les deux musiciens bifurquent vers des territoires musicaux presque inédits (comment qualifier l’univers ainsi composé ?) mais plus encore inventent des formes musicales alliant Jazz classique, accordéon jazz, improvisation échevelée et mélodies populaires. Nulle réponse convenue à ce mystère sinon cette alchimie résultant pour une grande part dans la complicité des deux instrumentistes-compositeurs. Lieu commun là encore mais ceux qui ont pu assister à la fin de vie, il y a quelques années du « vieux couple musical » constitué de Richard Galliano et Michel Portal dans une instrumentation proche comprendront. Problèmes d’ego ! C’est du moins ce que laissent à penser les anecdotes (en parties vraies ou partiellement fausses) relatées à propos de ce célèbre clarinettiste par Vincent Peirani - qui ne manquaient pas de piquant ! Ici rien de tel. Pas encore du moins. Les chorus ne se succèdent pas comme autant de morceaux de bravoure (quoique !) mais se font écho, se répondent et s’enchaînent le plus normalement du monde. Nés dans le contraste le plus total, ils finissent par fusionner.
Réconciliant peut-être amateurs d’un accordéon musette et ceux d’un jazz échevelé, ce duo a assurément séduit aussi ceux qui tenaient l’accordéon en suspicion et perfectionnaient leur connaissance du jazz !
Le spectateur heureux de cet ensorcellement en redemandait. Les musiciens ne se faisaient pas prier.

On pourra (re)lire l’article de Michel Delorme paru le 25 mars 2014 sur CultureJazz.fr à propos de leur disque en duo, "Belle Époque" (Vincent PEIRANI & Émile PARISIEN : l’art du duo.).
Notre ami était -on le comprend- intrigué par l’un des titres du CD, "Schubertauster", évoquant tour à tour l’écrivain Paul Auster ou le climat austère de cette composition. Que nenni.La vérité est venue de la bouche d’Émile Parisien :"L’huitre de Schubert". Comme la truite !
.::J-L L: :.

La Renaissance (Mondeville, 14), mardi 8 décembre 2015 à 20h30.
Émile Parisien et Vincent Peirani « Belle époque » : Emile Parisien : saxophone soprano / Vincent Peirani : accordéon.