Jours d’ouverture (5 & 6 février 2017).

OUISTREHAM JAZZ ESCALES, 2017
> L’OJBB invite Ludivine Issambourg & Henry Lemarchand, dimanche 5 février, salle Legoupil
> TABOU - Christine Ott, lundi 6 février, cinéma Le Cabieu

Nous avons pu vérifier en ces jours d’ouverture que cette 11ème édition grandit et avec elle, le nombre de ses amateurs (enfin une ouverture intelligente le dimanche est–on tenté de penser !).
Si l’on excepte en effet la ville de Coutances et son Jazz sous les Pommiers, le festival Jazz en Baie, il y a certes bien la programmation régulière de Jazz à Caen sur une saison entière (Théâtre, Conservatoire, Camion Jazz, bars divers) mais seuls des festivals de moindre voilure -et non de moindre intérêt- égayent le territoire (Jazz à Lisieux, Jazz dans les Prés, le festival PAN…). Le Ouistreham Jazz Escales poursuit donc son essor et c’est tant mieux. Avec sa thématique renouvelée et à chaque fois singulière : les drôles d’instrus pour cette nouvelle édition.
À tout seigneur tout honneur il revenait à l’OJBB [1] d’ouvrir le festival comme il se doit.

Formé de musiciens régionaux pour la plupart professionnels et enseignants dans les Écoles ou Conservatoire de musique, il fait entendre aussi bien sa qualité propre qu’il sert de partenaire aux musiciens invités. Tel était encore le cas ce dimanche 5 février en fin d’après-midi. Jouant le jeu du thème « imposé », l’OJBB avait choisi dans un premier temps des compositions inédites pour la formation et étrangères à l’instrumentation d’un big band. Bel exemple avec le choix du guitariste Pat Metheny alors que l’OJBB ne compte bien sûr pas de guitare. L’apport d’un EWI (Electronic Wind Instrument) -qui tient lieu de saxophone soprano tout en sonnant un peu comme un synthétiseur- constituait bien sûr la seconde surprise du chef Vincent Requeut . Le saxophoniste américain Michael Brecker étant l’un de ses utilisateurs renommés, l’OJBB avait naturellement inscrit des compositions de ce dernier à son répertoire. Première partie donc emballante, on l’aura compris, suivie d’invitations à des musiciens dotés sinon d’étranges instruments du moins d’instruments peu coutumiers de telles formations. En premier lieu le bandonéon de Henry Lemarchand en second lieu la flûte de Ludivine Issambourg. Là encore le bandonéon n’est bien sûr pas un drôle d’instru mais reste plutôt minoritaire en jazz (on pense à un certain Michel Portal qui concluait ses concerts en « tangotant ) et plus encore dans une grande formation alors, lorsque vous l’ajoutez à la flûte préparée de Ludivine Issambourg, l’étrangeté est au rendez-vous. Tout cela a ravi le public qui remplissait la salle Legoupil. Et l’on a pu retrouver les classiques empruntés ainsi au roi du bandonéon Astor Piazzolla grâce au premier, et entrer dans une certaine modernité par l’entremise de cette dernière et de ses compositions personnelles. Extraites de son premier album Electroshock mais aussi du second Lucid dream paru ces jours derniers (et déjà salué dans la presse dans Jazz Magazine) les compositions de la flûtiste –mêmes réarrangées pour la circonstance- étaient l’occasion pour les néophytes de découvrir la nouvelle expressivité de cette flûte traversière new-look et pour les autres d’entendre quelques titres nouveaux.
Pour la seconde journée, pas de concert à proprement parler mais un film. Pas davantage de jazz mais un vrai drôle d’instru renommé quoique peu « joué », les ondes Martenot .
Belle soirée également avec ce classique de Murnau, entre fiction et documentaire, Tabou (1931), projeté au cinéma Le Cabieu. Accompagné de sons venus d’ailleurs, d’un temps plus lointain encore (1918) que le film où les synthétiseurs n’existaient pas, l’exotisme des images [2] se dotait d’une formidable étrangeté. Christine Ott était aux différents "claviers", piano y compris. Avec une partition crée par ses soins pour ce film en 2012 et qui se substituait à celle originelle d’Hugo Reisenfeld, cette musicienne qui a fréquenté aussi bien Yann Tiersen, Radiohead que les compositeurs Edgar Varèse ou Olivier Messian a su insuffler à la magie des images la magie des sons.

Dès lors, cette onzième édition du festival n’avait plus qu’à bien se tenir.


[1Ouistreham Jazz Big Band

[2Réalisées par un chef opérateur au nom de Floyd Crosby , père de David Crosby ( Crosby Stills, Nash & Young).