JazzyColors s’épanouit

Jazzycolors, le festival des Instituts Culturels de Paris fête ses quinze ans et se déploie tout au long de novembre dans une vingtaine de lieux. Ce soir, au Centre Tchèque, grosse affluence pour écouter le Greg LAMY 4tet, concert présenté par la Mission Culturelle du Luxembourg en France. On baigne dans la plus belle idée de l’Europe : Le Luxembourg pour les musiciens, la Belgique pour le CD, la France pour la manager du groupe.

Nous, on se vautre dans une délicieuse cave voûtée emblématique du quartier qui sent son moyen-âge et le pognon à tous les étages. Pas de roms sur les trottoirs, pas de djeun’s dans les halls d’immeuble ( t’as vu un logement social dans le coin ? ) et conséquemment pas de flics en maraude.
Le quartet, fort de Greg LAMY à la guitare et aux compos, Gautier LAURENT à la contrebasse, Damien PRUD’HOMME au sax ténor et Jean-Marc ROBIN à la batterie s’installe dans un petit coin qui n’est pas sans rappeler le Petit Opportun.
Le premier morceau, Éclipse, ils le jouent propres sur eux : intro du taulier, thème à 4, solo du taulier qui ne semble pas un furieux des cavalcades le long du manche de sa gratte. Bon, qu’on se dit, jazz classique, terrain connu, c’est qui ma voisine. Mais non, le batteur qui ne fait pas que battre, met son grain de sel dans le solo et si le guitariste avait prévu de se la jouer pépère un soir à Paris, c’est râpé. Ses phrases lui reviennent au ras du filet avec en plus, un léger effet top spin qui l’oblige. Car, pour pousser, le batteur sait faire. Le ténor prend la suite et inutile d’espérer des hurlements, des crissements, des vlaouf et des scieries de son. Il brode autour du thème genre je vous en raconte une qui ne va pas vous perdre dés l’entame, une tout simple, avec du cause-effet, de la linéarité dans le scénar et un brin de poéticité, tout de même.
On sent tout de suite que la machine est rodée, sa récente tournée en Corée du Sud l’a huilée. Jouer Éclipse pour commencer, fallait oser : parce que mais si mais si, on les a et vus et entendus et écoutés.
Ils enchaînent avec Et si, solide pièce funky funky, ni du registre patrimonial ni de la plus contemporaine des tendances, There will be, courte pièce ou le ténor s’arrache la bouche et le batteur prouve que l’homme augmenté est une grosse connerie : deux bras et deux jambes suffisent pour le meilleur. Ils terminent le set avec un morceau mêlant du 3/4 et du 4/4, du genre assez casse-gueule. Le tout respire l’équilibre, le respect de codes, la belle entente sans avoir se livrer à quelque folie surjouée.
On ignore à quoi ils se sont livrés pendant la pause mais ils reviennent chauds-bouillants, le compte-tour dans le rouge !!!
Press Enter, titre éponyme du dernier CD puis Paradoxe  : tempo up et thème aussi secoué que le titre et super solo du ténor.
Ensuite, intro du bassiste : enfin seuls qu’il doit se dire le mec, ils peuvent m’écouter. Alors, il la raconte son histoire. Il était une fois.... la suite, c’est chacun comme il veut. Ils le rejoignent sur une tempo de chameau qui entame la traversée d’un désert sans horizon ni fin et le bassiste revient : il en profite, il avait des annexes, des addenda et des notes en bas de pages à ajouter.
Avec Control Swift, ils confirment l’incendie qui les consume : un vieux truc binaire que la batteur martèle avec le secret espoir d’effriter ici ou là un peu du ciment qui lie les briques de la voûte.
Évidemment, on les rappelle.
Et, sans déconner, le petit dernier, D Blues, pas du tout langoureux -j’emballe ma voisine ?- s’en vient copuler avec le meilleur du bebop.

Vendredi 17 novembre 2017
Le Centre Tchèque de Paris
18, rue Bonaparte
75006 PARIS


L’album :

Greg LAMY Quartet : "Press Enter"

À retrouver dans la prochaine Pile de Disques (début décembre 2017)...

> Igloo Records - IGL 286 / Socadisc

Greg Lamy : guitare / Gautier Laurent : basse / Johannes Müller : saxophone / Jean-Marc Robin : batterie

01. Control Swift / 02. There will be / 03. Le sujet / 04. A.-C. / 05. Exit / 06. Erase / 07. Press enter / 08. Le chien / 09. Blues for Jean / 10. Bonus Track : D Blues // Enregistré au Studio des Bruères (Poitiers - 86) en octobre 2016.