J’ai reçu un disque numérique polyvalent. En anglais, il appelle ça un « digital versatile disc ». En bref, c’est un dvd, un double. Cela n’arrive pas souvent et, la plupart du temps, ce sont des concerts plus ou moins bien filmés avec des bouts d’entretiens dans les loges (dans l’intimité de l’artiste, quoi) comprenant quelques phrases définitives et magistralement vides de sens, des considérations artistiques fumeuses et, c’est incontournable, des bonus si alléchants qu’ils font passer mon malus pour une œuvre d’art sensationnel, voire subversive (mon assureur ne dément pas). Mais là, dans ce petit colis postal, il y a Jean-François Pauvros et Guy Girard qui retracent leurs rencontres au fil des quatre dernières décennies. Autant dire que là où les radis calent, le radical est loin de mourir. Parce qu’il n’a pas d’estime pour le temps qui passe vu qu’il est occupé à improvivre. je m’excuse (narcissique un jour…), je voulais juste signifier mon contentement devant la double galette de roi délivré par le facteur, messager ultime quelquefois de bonne facture. Or donc, l’on croise dans ces films, démis en scène par le regard iconoclaste de Guy Girard, des artistes (voir ci-dessous) une omelette et des soucoupes volantes, des bateaux qui n’en peuvent plus d’aller sur l’eau et des lunettes aveuglant des regards lunaires, d’autres images encore avec la mer toujours recommencée, des mots atomes, des mots qui heurtent, des mots qui modèrent, et tout ce que je ne nomme pas ici afin de ne pas vous gâcher le plaisir. Le tout est lié par les fils conducteurs d’une guitare ; c’est celle de Jean-François Pauvros, inconnu illustre, nomade de par le vaste monde. Il y promène d’ailleurs son improbable puissance sonique et carbure (depuis toujours) au désir d’essence, au besoin de primarité complexe et à l’organique abrupt. À l’évidence, dans ce regard sonore à la périphérie du monde, tout est politique puisque tout est vivant (et tout est dégagé par celui qui s’engage). Sur l’autel du flux imagier imbibé d’extrémisme phonique, l’on est prié de ne pas prier. Accoster aux rives du battement musical interne, se laisser vasculariser par le fluide musical, le flou-ide aussi, c’est déjà pas mal. Cela peut, qui sait, permettre un regard contradictoire et éclairé sur la musique uniforme qui marche au pas en martelant nos pavillons. Don Pauvros de la manche et du manche, lui, il hisse ses couleurs aux moulins d’un onirisme hétéroclito-discordo-singulier. Avec un peu d’entrainement, la volupté est à ce prix, vous pourrez suivre, faire une expérience de transformisme auditif et visuel, à nulle autre pareille comme on dit chez Lagarde (qui meurt) et Michard (qui ne se rend pas). Un conseil ? Ne vous battez pas contre les cœurs qui battent à trois temps et les corps qui se débattent et qui valsent. Prenez la pulsation là où elle vous attrape et laissez-vous mijoter au coin du feu qui n’est pas mort, même quand la sémantique essaie de vous faire croire le contraire. Restez comme Don Pauvros à l’affût de la fureur et du silence, de leurs échos. Ça peut toujours servir pour chercher son chemin alors que rien n’a de sens. Et quoi que vous pensiez, ça fait du bien.


  JEAN FRANCOIS PAUVROS – 7 FILMS DE GUY GIRARD

La Huit

  DVD 1

  Don Pauvros De La Manche

66 mn – 2015

Avec : Arto LindsayTony HymasKeiji HainoCharles PennequinVincent FortempsXavier BoussironDanièle hugues, Marie-Pierre BréhantJean-Marc Rouget, Jean-François Pauvros

  DVD 2

  Hôtel Innova

5 mn – 1984

Avec Philippe, concierge de nuit & Jean-François Pauvros


  Les mi-grateurs

42 mn – 2000

Avec Keiji Haino, Jean-François Pauvros & François Causse


  Tué mon amour

3 mn – 2008

Avec Charles Pennequin & Jean-François Pauvros


  Catalogue à Bruxelles

3 mn – 2016

Avec Jac Berrocal, Jean-François Pauvros & Gilbert Artman


  Marteau rouge & Joe McPhee

22 mn 2000

Avec Joe McPhee, Jean-François Pauvros, Jean-Marc Foussat & Makoto Sato


  Vive Campus

– 15 mn – 2000

Avec Wasis Diop, La fanfarniente, Thierry Madiot, Pure Malt, Pascal Bence, Makato Sato, France Hervé cie, Fixx, Jody, Baggou, Jean-François Pauvros, Jac Berrocal, Bobby, Philippe Ambrosini , Germain et une poule.


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