dimanche 10 juillet

Ce dimanche, le pérégrin que je suis est allé faire un tour de piste au Chien à trois pattes, petite bestiole beaujolaise qui vieillit bien et accueille le public avec empathie. Le programme du jour réunissait autour du pianiste Antonio Bonazzo, Francesco Chiapperini (clarinette & clarinette basse), Cristiano Da Ros (contrebasse) et Fabrizio Carriero (batterie & percussions) : l’AB quartet. Les quatre milanais, sans les escalopes mais avec de la musique et une belle envie de jouer, avaient fait le déplacement et donnèrent un concert en un set devant un public relativement nombreux pour une date estivale, la dernière de la saison. Le programme était clair (de lune) : recréer certaines pièces de Claude Debussy à l’aune d’un jazz contemporain créatif. Le projet, initié pour le centenaire de la mort du compositeur, a bien tourné et ce que proposèrent les quatre membres du quartet fut parfaitement réglé. Tout l’intérêt de leur musique vint de l’approche telle qu’elle fut conçue, une sorte de mélange synesthésique entre deux langages, le classique et le jazz, sans que l’un ou l’autre prennent véritablement le dessus. Si à l’oreille le jazz l’emporta a priori, le classique fut pourtant bien présent, notamment par une écriture serrée qui laissa cependant une place non négligeable à l’improvisation (sinon je me serais emmerdé). Avec un traitement harmonique ambitieux, les mélodies complexes, toute en insinuation, peignirent des paysages colorés propices à la remémoration de l’œuvre du compositeur français. Était-ce aussi léger qu’une ligne debussienne ? Pas exactement. Était-ce le but avoué ? Non plus. De fait, le lyrisme musical inhérent à l’italianité des musiciens prit le dessus dès l’entame du concert. Avec des points d’acmé notoirement évocateurs, la musique du quartet capta sans difficulté l’attention du public, ce dernier manifestant son plaisir avec vigueur au point d’obtenir deux rappels. Par les temps qui courent, c’est assez rare pour être signalé. Ne pas faire commerce du jazz, donner l’occasion aux musiciens de s’exprimer pleinement, c’est un avantage (et un état d’esprit) que l’on ne rencontre plus que dans les petites structures. Cela se passa au Cuvage de Jasseron, la résidence estivale du chien à 3 pattes, et c’était un 10 juillet. J’ai volontairement évité les phrases longues car le 10 juillet est la date anniversaire de la naissance de Proust (1871). Et question longueur (langueur), personne ne rivalise avec Marcel qui, soit-dit en passant, aima beaucoup le Pelléas et Mélisande de Claude. Aurait-il également aimé le quartet d’Antonio Bonazzo ? Question sans réponse.


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