Second album de la saxophoniste sur le label ACT.

Le baryton possède le plus beau son de tous les saxophones. Et Melle Bonacina doit beaucoup aimer ce gros tuyau pour en tirer tant de substantifique moelle.
Elle excelle à en exprimer une tendresse infinie sur tempo médium ou méduim-lent, en tous points comparable à celle que Wayne Shorter sait si bien faire éclore de son saxophone ténor. Les meilleurs exemples se trouvent ici dans Souffle d’un songe, inspiré de la première Gymnopédie d’Erik Satie, excusez du peu, Lonely dancer, un live où une tournure de phrase vers la fin du solo frise le sublime, Open Heart, qui contient peut-être sa plus belle improvisation, et le lunaire Pierrot ( sic ), une mélodie éthérée due à son bassiste Kevin Reveyrand. Lequel récidive avec la très belle mélodie rêveuse, puis très africaine, de Watch Your Step.

Céline BONACINA Trio : "Open Heart"
ACT / Harmonia Mundi

Quelques amuseries, comme cet emprunt à l’intro de Walkin’ dans Out of Everywhere , où Céline montre qu’elle sait aussi « arracher » les notes, les « écorcher ». Et cette annexion du pont de Smooth Operator de Sade pour le thème de Bayrum, qui contient la plus belle attaque de solo du disque. Le vibraphoniste Pascal Schumacher y joue un solo percussif, plus proche de Milt Jackson que de Gary Burton, merci.

La batterie de Hary Ratsimbazafy, nom prédestiné pour l’instrument tant il sonne comme un roulement de caisse claire, assure une présence fidèle. Sans oublier le special guest de gala Mino Cinelu. Il se met en évidence dans la jungle de Wild World et les dunes venteuses de Desert. Une belle démonstration de percussion « tribale ». Pour le second titre nommé, Céline trompe son baryton préféré avec un beau soprano de passage.

Elle va récidiver avec un alto bien perché dans peut-être le plus beau morceau du disque, So close so far. Superbe intro évanescente, super ligne de basse, mélodie d’une douceur infinie, et la voix surnaturelle de Himiko Paganotti. L’alto s’envole pour se faire pressé à mi-parcours, on pense à la coda de Phil Woods dans Just the way you are de Billy Joel.
D’aucuns seront irrités par les re-recordings, qu’ils qualifieront de « bricolage ». Et surtout par la persistance sur certains titres de « vocalises ».
Mais elles font contrechant au développement instrumental, elles le soulignent, elles l’enflamment, comme dans le final de Desert.

Céline, pour notre plus grand bonheur, laisse tes mains sur tes anches.

P.S. Le « Label France », avec ou sans marinière, se porte très très bien dans le domaine du jazz en ce moment. Avec les productions de Daniel Humair, Jean-Paul Celea, Émile Parisien, Anne Paceo, Raphaël Imbert/André Jaume, Virginie Teychené, Yaron Herman, Misja Fitzgerald Michel, Andy Emler, Bojan Z, Henri Texier, Stéphane Kerecki … et pour sûr ce Céline Bonacina.


Céline BONACINA Trio : "Open Heart – Inviting Himiko Paganotti, Pascal Schumacher, Mino Cinelu" - ACT 9514-2 - distribution Harmonia Mundi

Céline Bonacina : saxophone baryton / Kevin Reveyrand : basse / Harry Ratsimbazafy : batterie // Invités / Himiko Paganotti : voix / Pascal Schumacher : vibraphone et glockenspiel / Mino Cinelu : percussion // Bonus track : Michael Wollny : piano / Lars Danilsson : basse

01. Souffle d’un songe / 02. Circle Dance / 03. Wild World / 04. Baryum / 05. So Close So Far (C. Bonacina / H. Paganotti) / 06. Watch your step / 07. Out of Everywhere / 08. Pierrot (K. Reveyrand) / 09. Desert / 10. Snap The Slap / 11. Bonus track : Lonely Dancer (M. Wollny)


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