"Sad and beautiful", nouvel album du trio.

Sad and Beautiful, le triste et le beau.
L’un ne va pas forcément avec l’autre et souvent on associe l’un avec l’autre sans se soucier des artifices. On pourrait s’engluer alors dans une sorte de romantisme dégoulinant, comme la confiture qui tombe de la tartine et coule entre les doigts, comme l’oignon qui fait glisser des larmes le long des joues, ça colle et bien souvent ça ne dure qu’un temps, ça fait pschitt, ça se dégonfle et on patauge dans la semoule d’un espèce de minimalisme ou d’une exubérance rance et sans goût, du réchauffé en quelque sorte.

EMLER - TCHAMITCHIAN – ÉCHAMPARD : "Sad and Beautiful"
La Buissonne / Harmonia Mundi

Vous connaissez certainement E.T.E. pour Andy Emler, Claude Tchamitchian, Eric Echampard si vous lisez régulièrement CultureJazz.fr. Alors, vous devez savoir que les trucs réchauffés c’est pas trop notre truc, ni les trucs qui collent (certes chacun a sa propre définition de la chose à CultureJazz, encore heureux).

Et puis quand on connaît les personnages qui composent ce trio on sait également que l’indifférence, la platitude, les contorsions, la fausse séduction, la fausse émotion ce n’est pas non plus leur chose. Non c’est plutôt comme un ballon ovale qui rebondit là où on ne l’attend pas, un jeu capricieux fait de passes lobées, de relances inattendues, d’esprit d’équipe.

Et dès la première note on flaire la bonne affaire du genre french flair. Non que l’imaginaire, la curiosité soit un fait de notre pays (quelle prétention !), mais celle d’artistes inventifs, investis dans leur époque.
Et ça commence comme ça : la contrebasse de Claude Tchamitchian d’un coup d’archet déchire le silence et défie le temps, le piano plaque des accords et quand on connaît Andy Emler et son immense science harmonique qui lui vient de la musique du XXè siècle, du jazz, de la culture pop, du rock, d’une saine curiosité, on ne peut pas être surpris des surprises, des couleurs et de l’énergie rythmique qui en découle, ni de l’irisation de la musique par Éric Échampard. Ça bruisse de sons, de cymbales, de toms, de sons tranchants, de sons suaves, bref ça vit.

Comme dans leurs deux précédents disques entre écriture et improvisation, pas de solistes à proprement parler, mais plutôt un groupe de trois mélodistes, musiciens hors normes, qui porte le chant et l’énergie, évoluant à l’intérieur d’un énorme ambitus de nuances et de tons qui traversent l’ensemble du disque et font l’unité de l’enregistrement. On envoie ici la purée comme on dit, dans la mêlée, avec l’énergie du désespoir de gens qui ne se rendront jamais et qui marquent un essai entre les barres à la dernière minute quand il n’y a presque plus d’espoir, quand on n’a plus que la beauté face à un monde inique.
Essai transformé.


> EMLER - TCHAMITCHIAN – ÉCHAMPARD : "Sad and Beautiful"

> La Buissonne RJAL397018 / Harmonia Mundi

Andy Emler : piano / Claude Tchamitchian : contrebasse / Éric Échampard : batterie

01. A Journey through hope (Emler) / 02. Last chance (Emler) / 03. Elegances (Emler) / 04. Second chance (Emler-Tchamitchian-Echampard) / 05. Tee time (Emler-Tchamitchian) / 06. By the way (Emler-Tchamitchian-Echampard) / 08. Try home (Emler-Tchamitchian-Echampard) //Enregistré les 1er et 2 juillet 2013 aux Studios la Buissonne (Pernes-les-Fontaines, 84) par Gérard de Haro et Romain Castéra.

> Retrouvez ce disque (et 24 autres !) dans la Pile de Disques de février 2014 sur CultureJazz.fr ! (le 4 février 2014)

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