23ème édition du 1er au 6 août 2014.

Depuis cinq ans à présent (mais hélas pas depuis 23 ans ), j’attends avec impatience la nouvelle édition du Tremplin Jazz d’Avignon qui fait toujours suite aux 3 semaines de festival de théâtre et permet de passer en douceur de l’animation fièvreuse des rues encombrées de monde à la douceur du mois d’août en se disant que non, l’été n’est pas fini à Avignon ! Le Jazz revient !

Comme chaque année, quatre soirées d’artistes confirmés encadrent deux soirées gratuites où parmi 6 groupes de musiciens sélectionnés (parmi plus de cent candidatures !), des prix sont distribués par un jury et par le public, le tout dans le lieu magique qu’est le Cloître des Carmes.


Vendredi 1er août.

Sandie Safont - Avignon, août 2014
© Florence Ducommun
© Florence Ducommun

La météo variable promet d’attendre minuit avant de changer....
Sandicate ouvre le bal à cinq : le leader Sandie Safont au chant avec Bernard Jean au vibraphone, François Cordas aux saxophones, Pierre Coutaudier à la batterie et Pierre Fayolle à la contrebasse. Tous sont des musiciens chevronnés de la région. Après un long sejour de formation à Londres, Sandie Safont s’est frottée à différents courants musicaux (où le Brésil a la part belle) pour ensuite participer à plusieurs projets.
Le dernier que nous avons écouté ce soir-là est en préparation et chacun peut participer à son financement via KissKissBank (voir le site). Les compositions du leader se mêlent à celles de Bernard Jean, toujours à la limite de la rupture d’équilibre (Like Ayers) avec un hommage à Gil Scott Heron (Free will, pour que chacun exerce son libre arbitre...) et des interprétations très réussies de chansons de Carlos Jobim et Vinicius de Moraes. Applaudissements nourris et beau départ du festival !

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Shahin Novrasli - Avignon, août 2014
© Florence Ducommun
© Florence Ducommun

Changement de plateau... et changement de temps pour Shahin Novrasli le pianiste originaire d’Azerbaidjan. À peine le trio (avec Nathan Peck à la contrebasse et Ari Hoenig à la batterie) s’est il installé que nous voyons avec effroi tomber de lourdes gouttes de pluie... Panique, repli dans l’enceinte du Cloître, bâchage rapide des instruments et prières pour stopper l’orage qui porteront leurs fruits car le concert reprendra 30 minutes après que toutes les fourmis de bénévoles se soient activées pour essuyer, enlever les flaques accumulées sur scène. Qu’ils en soient remerciés une fois de plus car nous assisterons là à un grand concert plein d’humilité... et d’humidité ! Une petite pluie tenace continuera tout le long pour arroser définitivement le final mais nous l’aurons entendu jusqu’au bout. Ce sont des visages heureux sous les parapluies qui quittent cette première soirée !
On peut écouter l’émission Openjazz sur France-Musique du 23 janvier 2014 consacrée à ce pianiste venu de classique : ici !.


Samedi 2 août.

Yael Miller - Avignon, août 2014
© Florence Ducommun
© Florence Ducommun
Julie Campiche - Avignon, août 2014
© Florence Ducommun
© Florence Ducommun

L’équipe du Tremplin Jazz a tout prévu. À 21 heures et sur les premières notes d’Orioxy, heureux Grand Prix du Jury en 2013, un orage mémorable s’abat sur Avignon... Tous regroupés dans les couloirs du Cloître, nous écoutons avec ravissement la jolie voix de Yael Miller accompagnée de Julie Campiche à la harpe, Emmanuel Hagmann à la contrebasse et Roland Merlinc à la batterie. Ce quartet genevois est vraiment intéressant par l’originalité de sa formule et par ses compositions toujours originales que je ne saurais qualifier tant il y a de métissage (jazz, blues, rock...!). Mention spéciale à la harpiste qui a montré une ingéniosité talentueuse et m’a conquise... Pendant ce temps, l’eau monte, monte et envahit le Cloître au moment même ou tout le monde attendait Christian Scott, LE trompettiste incontournable du moment. Nous l’apercevrons simplement, lui et ses musiciens, tous autant dépités que le public et repartirons en nous promettant de ne pas manquer son prochain passage. !

Le concert de Christian Scott aux Nancy Jazz Pulsations m’a retourné le couteau dans la plaie... voir dans son intégralité ici !


Dimanche 3 août.

Mélanie de Biasio - Avignon, août 2014
© Florence Ducommun
© Florence Ducommun

Changement de décor et de style avec le concert très attendu de Mélanie de Biasio, la nouvelle égérie d’origine belge.
La scénographie toute en ombres chinoises, ambiance sombre éclairée par quelques lumignons astucieusement placés, accentue le côté presque théâtral où les photos seront difficiles à prendre...
Une Mélanie toute menue entre en scène,toute de noir vêtue telle une Fantômette en ballerines se mouvant comme un félin. Ses yeux sont souvent fermés ou implorent le ciel, surtout lorqu’elle utilise sa flûte. Les mains bougent avec une grâce infinie. La voix est chaude. Elle masque souvent un côté de son visage avec une de ses mains... C’est tout simplement immensément beau et après un début un peu lent et mélancolique qui en désarçonne certains, le concert prend véritablement son envol avec un No deal épatant puis une sensationnelle reprise d’Afro Blue (composition de Mongo Santamaria connue pour l’interprétation de Coltrane) qui achève de convaincre les plus rétifs. Formidablement entourée de Dre Pallemaerts à la batterie, Pascal Paulus aux synthetiseurs, Pascal Mohy au piano et Samuel Gerstmans à la contrebasse, Mélanie de Biasio nous a tous invités à l’accompagner dans son voyage intérieur très personnel où les étoiles et la douceur enfin revenue terminaient de parfaire une soirée exceptionnelle !

Un petit échantillon qui donne le frisson à voir ici !


Viennent ensuite les deux soirées des sélections du Tremplin Jazz avec trois groupes chaque soir.

Lundi 4 août.

Le Tricycle - Avignon, août 2014
© Florence Ducommun
© Florence Ducommun

Les Rugissants, groupe français sous la houlette du pianiste Grégoire Letouvet qui recevra le prix de la meilleure composition, déjà obtenu au Tremplin Jazz à St-Germain en 2013.
Le Tricycle, trio français piano-basse-batterie dont le premier album vient de paraître avec, pour ma part, un énorme coup de coeur pour le pianiste Jean-René Mourot. (Allez donc y jeter une oreille sur YouTube). Aucun prix ne lui a été décerné hélas...
Le troisième groupe était allemand, originaire de Cologne : Schmid’s Huhn. Le saxophoniste Stefan Karl Schmid a obtenu le prix du meilleur interprète et pour cause !

Mardi 5 août.

La seconde soirée débute par la présentation de toute l’équipe des nombreux bénévoles (beau T-shirt jaune cette année pour remplacer le soleil un peu absent). Belle organisation de Robert Quaglierini, président du Trempin et Jean Michel Ambrosino son co-président avec un hommage de Geraldine Laurent et Stéphane Belmondo (tous deux membres du Jury cette année) à René Sacchelli, pilier du Tremplin disparu en décembre dernier. Ils interpréteront un "Brother" très émouvant...

Die Fichten - Avignon, août 2014
© Florence Ducommun
© Florence Ducommun

La soirée se poursuit avec Die Fichten qui verra revenir un saxophoniste de la veille Leonhard Huhn. Il obtiendra le Grand prix du Jury avec, à la clef, un enregistrement au studio de la Buissonne de Pernes les Fontaines tenu par Gérard de Haro et un passage en première partie d’un concert du Tremplin l’an prochain.
La soirée continuera avec Cadillac Palace, trio venu de Reims qui obtiendra le prix du public (venu en force le soutenir !) puis avec un quatrième groupe français, Blowing Thrill, quartet très enlevé comportant encore 2 saxophonistes. Qu’en dire si ce n’est que je ne pouvais plus écouter les saxophones à la fin, tellement ils ont été présents dans nombre de formations... J’aurais écouté volontiers plus de piano, de trompette, que sais-je ? (Avis personnel...)


Mercredi 6 août.

Mauro Gargano & Alexis Avakian - Avignon, août 2014
© Florence Ducommun
© Florence Ducommun

Et nous voilà à la dernière soirée avec le quartet du saxophoniste ténor Alexis Avakian en première partie.
Ludovic Allainmat au piano, Fabrice Moreau à la batterie et Mauro Gargano à la contrebasse... Excusez du peu !
Alexis Avakian se retrouve côté scène cette fois, après avoir assisté très souvent aux concerts côté public et on le sent très ému. Il présente son futur album dont la sortie est prévue en septembre, Digging Chami (prénom de son arrière grand-mère arménienne). Il fait venir un joueur de doudouk Haik Gouchtchian. De très jolies compositions où se mêlent influences orientales et occidentales avec une superbe Valse pour Zoé pour laquelle Stéphane Belmondo se joindra au quartet.

Manu Katché - Avignon, août 2014
© Florence Ducommun
© Florence Ducommun

La soirée se concluera brillamment avec Manu Katché qui a convoqué le ban et l’arrière ban de ses fans, amateurs de jazz ou non... et donc rempli le Cloître à ras bord !
Accompagné savamment de l’italien Luca Aquino à la trompette, de Tore Brunborg aux saxophones ténor et soprano (norvégien : ça se sent tout de suite au son vraiment particulier, éthéré) et de Jim Watson au piano et à l’orgue Hammond (anglais qui a conquis Katché), Manu nous sert un beau concert, avec un son reconnaissable entre mille. Poussif au début (un peu comme le leader tout essouflé pour nous présenter ses musiciens !), le concert décolle ensuite avec les morceaux les plus beaux de ses disques ECM...
Gros succés, vu la personnalité très médiatique du leader, qui m’a laissée néanmoins perplexe et partagée... Ses musiciens remarquables ont mérité plus que lui, à mon avis, le tonnerre d’applaudissements.

Rendez-vous est pris pour l’année prochaine !


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