Henri TEXIER Sky Dancers

> Théâtre de Caen , Jeudi 26 janvier 2017.

« Les indiens sont encore loin  » [1]

On a tout vu, tout entendu, tout dit, tout écrit -pense-t-on- sur cette figure immuable du jazz français qu’est le contrebassiste Henri Texier. Immuable et populaire ; ceci expliquant certainement cela.

Henri Texier - Coutances, mai 2016 - © Sébastien Toulorge

Le concert du dernier festival Jazz sous les pommiers avait été pris d’assaut, les absents –dont nous faisions partie- ont pu se rattraper jeudi soir au Théâtre de Caen !
On reconnaît le contrebassiste à son bonnet marin (breton) bien vissé sur la tête, à ses gris-gris (sa boite à musique et son « Internationale » mécanique) et ses convictions bien ancrées. On l’identifie aussi par ses territoires lointains qu’il aime depuis des lustres annexer au jazz. Après l’Afrique, place aux Indiens d’Amérique : le musicien breton aime bien les racines -si on peut dire. Lisible dans les titres et dans les apartés, ces racines musicales se fondent néanmoins dans les compositions sans verser dans le folklore. Le jazz est plus fort et l’univers de Texier trop personnel aussi. Ni l’un ni l’autre ne sont solubles dans la « world music  ».
Et l’on retrouve ainsi, sans surprise peut-être mais avec plaisir sûrement, ces thèmes, ces arrangements qui font le charme des concerts de celui qui a toujours su faire chanter le jazz, y compris à l’époque où ce dernier croyait trouver sa survie dans ses derniers retranchements.
Immuable, pérenne, Texier incarne ses qualités ; cette permanence ne l’empêche nullement d’intégrer de nouveaux musiciens, de nouvelles influences à son univers et de le renouveler de ce fait pour une part. Le guitariste Nguyen Lê fait partie de ceux-là qui ont su trouver l’équilibre entre leur jeu personnel et le « collectif Texier » Avec une sobriété sinon une discrétion plus grande qu’à l’accoutumée, il permettait aussi de redécouvrir la richesse de sa palette sonore. Cela vaut également pour le tumultueux pianiste Armel Dupas ( par ailleurs compositeur pour les films d’Honoré, Desplechin et Gondry ). Ainsi que pour les deux saxophonistes complices Sébastien Texier (un air de famille !) et François Corneloup. En dehors du batteur Guillaume Dommartin, pourtant tout nouveau venu, l’univers de Texier aux chorus individuels préférait le jeu collectif. C’est d’ailleurs une composition dédiée à cet autre batteur prestigieux, Paul Motian, qui va donner le départ à une seconde partie de concert qui s’emballe avant de se conclure par un titre des temps immémoriaux du contrebassiste qui fait office de signature de cet état de permanence du musicien.,


  Alex STUART Quintet

> samedi 28 janvier 2017, Foyers du Théâtre de Caen.

Le charme discret du guitariste Alex Stuart.

De territoires lointains, il était encore question deux jours plus tard dans cette même enceinte du Théâtre de Caen à l’occasion de son traditionnel rendez-vous Jazz dans les Foyers. Il s’agissait d’accueillir une jeune formation et un jeune guitariste prometteur, l’Alex Stuart Quintet. En effet, français par son accent, venu d’Australie, aux origines vietnamiennes, voilà un musicien –compositeur dont l’inspiration se joue des frontières géographiques. On ne s’étonne pas que nombre de titres originaux sont autant d’hommages à ses multiples origines. Cependant le jazz, familier de ces brassages, intègre aisément ces influences venues de toute part. Et c’est donc une jeune formation talentueuse, au jazz tonique qu’on découvre sous les cieux caennais avec certes un voisin familier, le batteur Antoine Banville mais aussi deux jeunes gens plein de fougue et d’inventivité que sont le saxophoniste Irvin Acao et le trompettiste Michel Arno de Casanove (qui remplaçait le saxophoniste Stéphane Guillaume) auxquels il faut ajouter bien sûr le contrebassiste Christophe Walemme. S’il y a un jeu collectif dans la formation de Texier, c’est aussi parce que la contrebasse est rarement un instrument soliste ; la chose est plus surprenante s’agissant d’une guitare, instrument soliste par excellence. Rien de tel avec Alex Stuart. La sobriété de son jeu n’a d’égale que son efficacité à souder l’ensemble des instrumentistes.
Leader qui charpente le groupe sans tirer la couverture à lui : voilà une discrétion qui surprend dans une corporation (les guitaristes) qui brillent plutôt par leur présence… jusqu’à l’excès.
Première impression : un musicien, une formation attachante à suivre.


Henri Texier Sky Dancers : Henri Texier : contrebasse / Sébastien Texier : saxophone alto, clarinette / François Corneloup : saxophone baryton / Armel Dupas : piano, claviers / Nguyen Lê : guitare / Guillaume Dommartin : batterie

Alex Stuart Quintet  : Alex Stuart : guitare / Irving Acao : saxophone / Christophe Wallemme : contrebasse / Antoine Banville : batterie / Arno de Casanove : trompette


[1Titre du film de Patricia Morraz - (1977)