Onzième équipée

Le 13 octobre dernier, tiens donc, la vignette sur le pare-brise de ma fidèle automobile était encore valable. Une raison plus que valable pour ne pas manquer le duo de la rentrée, Sylvie Courvoisier et Mary Halvorson. Et le Chorus de Jean-Claude Rochat étant souvent lieu d’élection pour les belles affiches, allais-je, avant qu’ils ne meurent, priver mes neurones d’un si doux plaisir ? Franchement, un peu d’autoroute et d’été indien n’allait pas nuire car les deux artistes présentent des carrières respectives empreintes de beauté inaccessible ou presque. Impossible dès lors d’échapper à ce concert. Et à l’entame, aux premières notes, il fut clair que la magie allait mêler à cette soirée intimiste une dose conséquente d’épatement. Au fil du temps qui disparut je ne sais où, la musique séduisit les auditeurs par son éclat moiré et sa sensitivité. Ardue peut-être dans les structures, absconse jamais, elle titilla la matière grise encore disponible sous mon crâne, offrant d’un instant l’autre des échappées mélodiques à l’hypersensibilité affirmée. Les deux musiciennes aux univers personnels puissants firent jouer leurs intelligences complices dans un dialogue de plein accord où chacune confronta avec l’autre ses idées musicales. Comme elles émanaient en nombre d’une grisante variété, ce fut intense et extrait d’un corpus, outrepassant largement le jazz, au sein duquel la pianiste et la guitariste mirent en jeu une gamme d’émotions natives mâtinées d’expérimentation qui fonctionnèrent au-delà de mes espérances tant elles furent le fruit d’un inestimable territoire commun. Plus que de coutume, j’oubliai ma boîte à images. C’est vous dire.

Mais dites-moi, vous ai-je signalé que le 13 octobre a connu un phénomène solaire observé par des dizaines de milliers de témoins, à savoir la danse du soleil à Fátima. Ne m’en demandez pas plus, c’était en 1917 et mon moi précédent, s’il entendit bien des histoires à l’époque, ne transmit rien au moi qui m’occupe aujourd’hui. D’ailleurs, une histoire de moulins à vent portugais, je m’en serais souvenu, peu s’en faut, comme d’un affront personnel au presque ibère (quasi cavalier) inféodé au rêve ultime qui agite mon couvre-chef. Mais là, franchement, ce n’était quand même pas le futur d’Eddy Cochran qui gigotait sur un « Summertime blues » écrit avant l’heure… Aussi et avant que j’oublie, comme il est encore de ce monde, Lee Konitz fêta ce même 13 octobre 2018 ses 91 ans, soit approximativement 33 237 jours de vie terrestre. Parker disait à son sujet qu’il était le seul à ne pas l’imiter. C’est heureux car autrement, il serait mort depuis longtemps.


Dans nos oreilles

Miles Davis - We want Miles


Devant nos yeux

Romain Gary
- Une page d’histoire


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