Soeurs de sang

Il y a chez Jean-Marie Machado une attirance certaine pour la culture orientale comme en témoignait en 2005 l’oeuvre créée avec l’Ensemble (Orchestre de Basse-Normandie). Pour ce disque, c’est une citation du poète japonais Okakura Kakuzô qui donne l’âme de cette nouvelle oeuvre : "Les fleurs sont les larmes des étoiles".

C’est un hommage à deux étoiles qu’a composé le pianiste. Un bouquet aux teintes variées offert à Billie Holiday et Amalia Rodriguès réunies ici comme deux soeurs de sang.

Jean-Marie Machado - "Soeurs de Sang"
Le Chant du Monde - 2007 - dist. Harmonia Mundi

La démarche de Jean-Marie Machado rélève d’une réflexion profonde et complexe sur des liens hypothétiques entre les cultures et les musiques. De ces hypothèses naît un raisonnement qui relève de l’expérience. La réussite n’est pas assurée. Peut-on tisser des liens entre le blues et le saudade, entre le fado et le jazz ? Après Andaloucia [1] qui avait donné une nouvelle vie aux oeuvres de compositeurs espagnols, Soeurs de Sang réussit bien son challenge : un premier disque en solo pour traduire les émotions intérieures, un second en trio pous les extérioriser.

Solideao, le versant soliste de ce disque s’articule sur douze thèmes, hommages imbriqués aux deux étoiles. Le piano sonne remarquablement et met en valeur le jeu varié du pianiste en équilibre entre le plaisir de la mélodie presque romantique et la tentation du rythme (Nao Quero Amar).

Avec le Trio Time, l’atmosphère se fait plus souple, plus féline. Les espaces s’ouvrent entre les membres du trio. Avec des complices comme Jean-Philippe Viret, contrebassiste de tempérament, et Jacques Mahieux, plus inventif que jamais, Jean-Marie Machado s’est donné les moyens de revenir à la formule du trio pour affirmer une identité. Flowers, teardrops from the stars donne le ton d’entrée avec une magnifique introduction sur fond de contrebasse à l’archet et développement avec des varitions d’intensité (le jeu de Jacques Mahieux pour propulser le piano). On s’arrêtera en particulier sur Sisters qui met en évidence la richesse du dialogue dans le trio (toujours Jacques Mahieux !).

Soeurs de Sang n’est pas un disque dans l’air du temps qui se "consommera" et s’oubliera. C’est une oeuvre sensible et plus complexe qu’il n’y paraît (un peu "savante" diront certains ?), aussi complexe sans doute que la personnalité de ce pianiste qui puise ses racines du Portugal à l’Italie et apporte une touche essentielle au paysage du jazz en France.


> Soeurs de Sang - Le Chant du Monde 2741498.99 - distribution Harmonia Mundi

Jean-Marie Machado (piano) / Jean-Philippe Viret (contrebasse) / Jacques Mahieux (batterie)

Enregistré en octobre 2006 aux Studios La Buissonne (Pernes Les Fontaines) par Gérard de Haro.

  • Solideao (CD1-solo) : 1 - Irmas de sangre / 2 - Solideao / 3 - Petite source / 4 - La Bocca / 5 - Don’t explain / 6 - Nao quero amar / 7 - Lisboa bao sejas Francesa / 8 - I’m a fool to want you / 9 - Cabeca no ombro / 10 - Fragment de source / 11 - White gardenia / 12 - Foulard rouge
  • Trio Time (CD2) :1 - Flowers, teardrops from the sky / 2 - Trio time / 3 - Fado Amalia / 4 - Sisters / 5 - Canto Lento /6 - Meu Fado / 7 - Strange fruit / 8 - God Bless the child / 9 - In fragrance of white roses / 10 - Open blues

    > Liens :

  • www.jeanmariemachado.com
  • www.lechantdumonde.com

[1Précédent album chez le Chant du Monde en 2004, en sextet.