Soixante-sixième équipée - Entre les murs

Ce n’est pas comme si on s’ennuyait, non, mais bon, on n’est pas hilare non plus quand on écrit une chronique du désert. Mais quel désert ? Celui de Le Clézio ? Déjà lu. Le désert, il est dehors, il est dedans. Il faut juste le nier. Et puis le désert, on ne va pas en faire un fromage. C’est l’un ou l’autre. Alors je parle d’autre chose ; de Qwest.tv pour être précis. Et je me souviens qu’il fut un temps sans Internet où, pour voir du jazz, il suffisait d’une télévision. Adolescent, j’allais sur la deuxième chaine du service public. Jean Christophe Averty régnait là en maître et c’est ainsi que j’ai découvert cette musique dans un cadre familial qui n’était pas socialement propice à la culture. C’était il y a longtemps. Après cela, une chaîne privée prit le relai pendant une quinzaine d’années avec Philippe Adler. Depuis, plus rien. Ou pour être précis plus rien de gratuit. Une chaîne existe qui diffuse du jazz mais elle est payante et il faut aujourd’hui aller sur Internet pour visionner sur France Télévisions quelques concerts ou sur Arte Concert qui propose quelques programmes un peu plus pointus. La création de Qwest.tv par Quincy Jones et Reza Ackbaraly est donc une bonne nouvelle car c’est la seule offre qui propose principalement du jazz et m’évite de me perdre en recherches chiantes à souhait sur la toile (comme disent les anciens). Hélas, c’est évidemment payant. Mais peut-on demander à des investisseurs privés de se transformer en mécènes sous prétexte que le service public ne fait pas correctement son travail ? Non. L’utopie perdure cependant. C’est plus fort que moi.

Après quelques heures passées à fouiller le contenu devant l’écran, je retiens donc que Qwest.tv est une initiative indépendante et franchement intéressante qui promeut le jazz et les musiques connexes avec un réel souci de diversité. L’on y trouve naturellement des concerts et des documentaires sur les plus grands, les incontournables et autres génies du genre. Mais l’on peut également accéder à des artistes actuels, pas nécessairement les plus connus, dont les évidentes qualités méritent de facto d’être mises en valeur et proposées au plus grand nombre. Qwest.tv le fait et cela mérite d’être signalé. Son autre intérêt est qu’elle couvre une vaste période et donne à ses utilisateurs la possibilité de découvrir des archives vieilles d’un demi-siècle et l’on voit, grâce à la Rtbf, que même Lee Konitz et Charles Lloyd ont été jeunes un jour ou que Dionne Warwick a bel et bien vécu sur terre. A l’autre bout de la chaîne temporelle, nous avons noté un beau et émouvant concert d’Allen Toussaint lors d’une Baloise session et ce, deux jours avant son décès à l’issue d’une soirée madrilène. Confinement oblige, nous avons pu approfondir notre fréquentation du site, visionner nombre de concerts et autres documentaires, et sommes à même d’affirmer que oui, Qwest.tv est une belle initiative, payante certes, mais qui a le mérite de promouvoir une musique relativement (euphémisme) ostracisée dans les médias génériques, musique que nous aimons et défendons envers et contre tout pour sa créativité et sa diversité. Mais bon, maintenant je commence à avoir les yeux carrés.


Dans nos oreilles

Michel Petruccianni - Pianism


Devant nos yeux

Edith Wharton - Leurs enfants


https://videos.qwest.tv