FRENCHQUARTER 2021 en streaming

Trois concerts étaient retransmis en direct en France, filmés dans trois clubs new-yorkais : Mezzrow, Bar Bayeux et Smalls Jazz Club du 11 au 14 janvier.

On raconte qu’au XIVème siècle un chanoine se serait claquemuré durant une année dans sa maison à Reims pour échapper à la peste noire qui ravageait alors l’Europe. En aurait il profité pour écrire la Messe Nostre Dame chef d’œuvre musical polyphonique et le Voir-Dit autre chef d’œuvre mais littéraire cette fois ci ? Nous vous laisserons faire la part entre légende et vérité, nous y verrons nous, une part d’espoir, celui de cette culture vitale et essentielle à laquelle nous tenons tant et sans laquelle nous ne serions rien. Nul doute que la part créative de l’humanité enfermée dans la bulle des confinements, des couvre-feux, des décisions technocratiques sérieuses et pragmatiques, de l’indifférence et du mépris éclatera sous nos yeux transits, entre effarements et émerveillements. De ces espoirs nous ferons une réalité le jour de la résurgence.
Toujours est il que le monde des arts souffre dans sa globalité, qu’à la précarité de ses acteurs et lieux vient s’ajouter un horizon où pour l’instant le sombre s’ajoute au sombre dans un enroulement perpétuel. Nous ne ferons pas ici de dichotomie, mais nous sommes moins inquiet pour les grandes institutions que pour les « petits » lieux indispensables bien plus fragiles dont l’économie vacille et pour l’ensemble de ses acteurs (propriétaires et gérants de club, techniciens) et en particulier les musicien(ne)s.
La musique ne tient que par ses jeux les plus divers, ses croisements, ses enseignements et ses recherches. Celle qui nous occupe ici n’y échappe pas.
L’étude indispensable doit être mis au service de la musique vivante, de celle que l’on joue quand c’est le temps du jouage. Alors que faire aujourd’hui à part faire avec ce qui nous est encore possible de faire à l’instant T (qui est la somme de tous les temps). Il n’est pas question ici de dire ce qui est bien ou pas mais bien de faire avec ce que l’on a sous la main et que c’est toujours mieux que de ne rien faire. Ne soyons, en l’exemple, pas dupe de ce qui se trame, du piège mortel qui nous guette : l’acte artistique n’est pas gratuit auquel cas ça ne serait qu’un divertissement sans fond, et rien absolument rien ne remplacera l’in vivo et certainement pas l’in vitro.

Mezzrow le lundi 11 janvier Alex Terrier & Kenny Barron

Alex Terrier : Saxophone Alto, Kenny Barron : Piano

Alex Terrier

Alex Terrier est un saxophoniste français établi à New York depuis une quinzaine d’années, à la fois pédagogue et créateur de multiples projets aussi bien sur le continent américain qu’européen. Ce soir c’est le jazz intemporel par excellence qu’il nous offre en compagnie de Kenny Barron, dans une lignée qui remonte aux duos de Louis Armstrong et Earl Hines. Des standards, On a Slow Boat to China dans une belle interprétation d’Alex, du Monk Ask Me Now avec un des pianiste-passeur les plus fidèle du grand moine. Mais aussi des compositions d’Alex aux structures intéressantes et quelques pièces de Kenny Barron dont un très beau Dolores Street. Une prestation aboutie.

https://www.alexterriermusic.com/

Bar Bayeux le mardi 12 janvier 21 Jerome Sabbagh 4TET :

Jérôme Sabbagh : saxophone Tenor, Melissa Aldana : saxophone Tenor, Peter Washington : contrebasse, Bill Stewart : batterie

Jerome Sabbagh

Un jazz d’une même lignée que précédemment, même type de standards d’autres Monk (wee see) d’autres chansons certes, mais l’absence d’instrument harmonique offre ici d’autres possibilités, d’autres ouvertures et espaces, l’occasion pour nous de découvrir Melissa qui s’inscrit dans les pas d’un Mark Turner avec la recherche de lignes mélodiques plus anguleuses en laissant le temps nécessaire à la respiration, un Jérôme Sabbagh dans la droite ligne des grands stylistes de cette musique des phrases qui accrochent notre attention et une rythmique quasi indestructible au swing irréprochable.

https://www.jeromesabbagh.com/

SMALLS JAZZ CLUB le jeudi 14 janvier Clovis Nicolas 5TET :

Jeremy Pelt : trompette, Jon Bouttelier : sax tenor, Miki Yamanaka : piano
Clovis Nicolas : contrebasse, Jimmy Macbride : batterie

Clovis Nicolas

Un quintet plus classique dont la forme se rapproche du groupe de Max Roach avec Clifford Brown et dont certains titres originaux vont jusqu’au second quintet de Miles Davis, on a de plus mauvaises fréquentations. Là aussi des solos d’excellentes factures, des compositions originales mais peut être aurions nous aimé un peu plus de folies et de lâcher-prises, cela dit une musique dont apprécie les couleurs et le swing.

https://clovisnicolas.com/

Nous ne savons pas si Guillaume de Machaut a pu écouter de son vivant sa géniale Messe Nostre Dame ou son Voir-Dit mais son art visionnaire résonne encore dans nos oreilles malgré les quelques 7 siècles encombrés de tragédies de joies et maladies incurables qui nous en séparent. Alors nous ne désespérerons pas, l’art, la culture, qu’il soit musical ou autre trouvera sa voie(x) car il ne peut pas faire autrement. Sa fin signifierait la notre. Alors attendons cette résurgence avec impatience et lorsque arrivera le moment des retrouvailles nous aurons des trouvailles, l’une n’allant pas sans l’autre.

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Des participations libres sont possibles pour chacun des événements

https://www.parisjazzclub.net/fr

Pierre Gros