MICHEL PORTAL BOJAN Z Les Franciscaines Deauville 22 octobre 2022

Voyages divers

Swing in Deauville est déjà un lointain souvenir (1989-2008) avec ses musiciens prestigieux (Herbie Hancock, Dave Holland, Chick Corea, Dave Brubeck, ONJ…) pour finir par s’ouvrir(?) à Jean Louis Aubert, Etienne Daho, Yannick Noah, Laurent Voulzy… et finalement se refermer.
Depuis lors, la programmation jazz n’a pas complètement cessé d’exister ainsi que le rappelait le responsable des Franciscaines évoquant l’accueil récent- isolément- des différents pianistes qui composent le groupe des Quatre pianos, Quatre pianistes ; à savoir Baptiste Trotignon, Pierre de Bethmann, Eric Legnini et ce dernier soir, Bojan Z.
Ce samedi soir 22 octobre, il était en compagnie d’un arpenteur chevronné des salles de concert, le clarinettiste Michel Portal.
La chapelle des Franciscaines et son architecture renvoient au passé religieux de l’ensemble de l’édifice (les religieuses se sont installées dans un couvent construit par leurs soins -juste à côté - début 2010) et son aménagement est à la fois respectueux de cette histoire et inventif pour cette nouvelle page culturelle, faisant une belle place aux livres (médiathèque), aux expositions (fonds André Hambourg, salles dédiées à cet usage), à la déambulation ainsi qu’aux concerts. Et ce depuis environ deux ans.
Dans ce cadre singulier, Michel Portal est apparu toujours aussi frêle, un peu plus fragile mais plus infatigable que jamais.
Il est vrai que l’association avec le chaleureux pianiste Bojan Z n’ est pas étrangère à ce débordement d’énergie. Rien à voir, en effet, avec ce fâcheux duo, constitué, il y a plus de dix ans, par le clarinettiste lui-même et l’accordéoniste Richard Galliano, tous les deux à couteaux tirés sur la scène de Coutances au terme ( ?) d’une tournée, si ma mémoire est bonne. En tout juste une heure, la messe avait été dite.
Ce samedi soir dernier, elle a duré deux heures ; Portal quittant la scène avec regret et non sans un amusant cabotinage qu’on ne lui connaissait peut-être pas à ce point, après cinq ou six faux départs.
Entretemps, les duettistes ont eu le loisir de faire voyager cette salle pleine de plus de deux cents spectateurs. Autant de voyages, autant de musiques inventées au gré des pérégrinations qui mènent d’ Arménie, en Afrique, en passant par l’Espagne pour l’un et pour l’autre, à son origine des Balkans qui alimentent son folklore personnel.
Le tout fait entendre un musée imaginaire constitué des souvenirs et des musiques amassées au fil du temps et rejouées au présent. Alors de la musique tzigane de Bojan z aux tangos du bandonéon de Michel Portal (sans oublier des titres de son dernier enregistrement en date MP85), il y en avait pour tout le monde.
La preuve de cette réussite pouvait se lire par l’accueil reçu de la part des aficionados de longue date aussi bien que par ceux qui les découvraient.
Michel Portal n’est peut-être pas un musicien de jazz ainsi qu’a pu l’affirmer, non sans malice, le batteur Aldo Romano dans les colonnes de Jazz Mag ; sa formation et ses racines n’étant ni le blues ni le swing. Mais en dépit (et aussi grâce à) de sa formation classique, il a su prendre, au fil des décennies, des expérimentations et des compagnonnages toute sa place dans le paysage jazz par ses qualités d’instrumentiste, de compositeur et d’improvisateur.
Enfin la présence ce samedi soir, à ses côtés du remuant et swinguant pianiste serbe en remettait une couche (de jazz).