C’est presque AMARCORDES

> Jeudi 17 mars 2011 - Le Triton - Les Lilas (93)

Vous avez écouté trois cent mille fois chaque standard du jazz, vous connaissez par cœur les chorus des plus grands et vous les chantonnez en les écoutant, vous pouvez citer le nom du morceau, la composition du groupe, la date de son enregistrement et d’autres détails encore. Vous mâchez comme un kôan la question récurrente : y a-t-il une vie après John, Miles, Matthias ou qui que ce soit que vous adorez ?

La réponse est « Oui » et c’est ce soir, au Triton où est programmé, avec un à propos étonnant, le trio acoustique AMARCO. À propos étonnant du fait de la rencontre de ce concert acoustique avec l’actualité brûlante des incendies du combustible nucléaire de la centrale nucléaire de Fukushima, productrice d’électricité nucléaire et de déchets à durée de vie de l’ordre du million d’années. Oui, pendant que le Japon vit une crise qui relève d’un impensé radical ( la seule crise qui vaille ) où chacun, les convaincus et les autres, re-découvre que le risque zéro des propagandistes acharnés du nucléaire civil ET militaire est un gros vilain mensonge, que la biosphère nommée Terre est un lieu où règne l’interdépendance de tous les systèmes et qui se fiche pas mal des frontières ( même celles de la France ), les trois lascars du trio la jouent totale écologique ( au sens de « respectueux de l’environnement » ). Guillaume ROY, violon alto, Vincent COURTOIS, violoncelle et Claude TCHAMITCHIAN, contrebasse s’emploient avec leurs petites mains et leurs archets ( et tout leur corps ….. ) à gratter, pincer, frotter les cordes et plus si affinités. Sans électricité mais à l’huile de coude et avec transpiration ( ici, le système de refroidissement est intégré.... ).

Claude Tchamitchian, Guillaume Roy et Vincent Courtois : "Amarco"
©DR

Ils inventent leur musique au fur et à mesure, pas à pas et aucune partition ne transmettra jamais cette création instantanée et éphémère. Merci pour les arbres.

À les regarder à contre jour, on peut croire qu’ils ont bénéficié d’une dotation en oreilles géantes quasi invisibles, orientées touzazimut, qui alimentent, localement, cette idée féconde d’interdépendance. Leur musique improvisée, inouïe donc, se construit autour d’oppositions multiples ( aigu-grave, court-long, pincé-frotté, lent-rapide, fort-ténu, tension-détente, …. ), de synchronies ( Tous-ensemble-tous-ensemble-oui !! ), d’alliances ( un contre deux/ chacun contre chacun ), d’incipit répétitifs rythmiques ou harmoniques qui incitent, proposent, sous-tendent, prolongent, ...etc... etc...

  • C’est un pur bonheur. Leur musique imagée nous fait glousser de plaisir. C’est simplement BEAU.
Guillaume ROY, Vincent COURTOIS, Claude TCHAMITCHIAN : "Amarco"
Émouvance / Absilone- Socadisc

Le second set nous vaudra un trio à quatre avec en invitée surprise la sublime Élise CARON qui trouve tout de suite sa place dans ce trio d’hommes déjà installé. Bravo. Et, hasard ? elle nous offre une superbe impro en gromelot qui sonne japonais de chez japonais.

Concert acoustique ? Performance artistique ? Les catégories s’effacent, ne subsiste que CE moment.

Quelques pistes pour en finir : sur le site « piecesetmaindoeuvre.com », leur dernière livraison : « on vous l’avait bien dit  ». Édifiant.

  • Un livre : Hapennings de Jean-Jacques Rebel, par Androula Michael aux éditions Hazan,
  • un autre : Artivisme, par Stéphanie Lemoine et Samira Ouardi aux éditions Altern.

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