Plus d’un tour dans ses cordes !

> Marseille – Atelier des Arts - 30 novembre 2018

Naïma Girou (contrebasse, chant), John Owens (guitare), Thomas Doméné (batterie)

Quelques jours après le trio de Thomas Bramerie au Cri du Port (lire ici...), Marseille accueillait le trio de Naïma Girou à l’Atelier des Arts dans le 9ème arrondissement, un lieu chaleureux configuré en club avec tables rondes et chaises confortables mais sans les cliquetis des verres et bouteilles, les boissons étant prévues après le concert et non pendant. Heureuse précaution pour ce set où la proximité entre les musiciens et le public ainsi que la qualité d’écoute de ce dernier ont été appréciées (le cidre aussi, ensuite, pour un Normand expatrié). L’équipe du Cri du Port était à la manœuvre dans le cadre du Festival Jazz sur la Ville qui touchait là à sa conclusion.

Naïma a baigné dans la musique, en particulier de jazz, depuis sa plus tendre enfance et son prénom a été inspiré par la célèbre ballade de John Coltrane et son adaptation par les Double Six. Outre les cordes de sa contrebasse qu’elle manie avec talent, elle sait tirer parti de ses cordes vocales avec une grande diversité de timbres et d’ambiances. Son quartet était pour l’occasion, en l’absence de piano à demeure en ce lieu, réduit à un trio associant les excellents John Owens à la guitare et Thomas Doméné à la batterie. Les contrebassistes-chanteuses sont rares ; songez à Esparanza Spalding et Sarah Murcia comme grandes sœurs et inspiratrices de notre Montpelliéraine du jour.

Alternant standards et compositions originales, le trio revisite à sa façon la culture et l’héritage du jazz : contrebasse ronde, voix tout en nuances et parfois espiègle mais sans excès, guitare au son sobre et efficace (loin de la débauche d’effets cultivée par d’autres), batteur qui a plus d’une tour dans son sac (il vient de Carcassonne). Tout cela est plein de fraîcheur avec une petite note d’impertinence -ou en tout cas de facétie- dans les commentaires amusants entre les morceaux. Il faut dire que Naïma Girou a été révélée comme prix du public au festival de Crest ciblé sur le jazz vocal, et qu’elle a débuté par le chant avant de choisir la contrebasse pour s’accompagner. Bien lui en a pris !

C’est ainsi que le trio venu de Montpellier nous a offert un joli petit voyage sonore. Le choix des titres et les commentaires ont pu faire penser à un acte de militantisme féministe, tout en suggestion : Wives and Lovers (Burt Bacharach-Hal David), Never Will I Marry (Frank Loesser), I’m through with love (Fud Livingston-Matty Malneck). On est dans la culture jazz mâtinée de music-hall mais revisitée avec en grande sincérité, loin du déballage conventionnel et ennuyeux que nous avions entendu tout près d’ici et en plein air en juin dernier (on ne donnera pas le nom de la chanteuse visée, par respect pour les artistes !).

Les compositions originales, elles aussi fraîches et revigorantes, nous plongent dans une ambiance apaisée, dont une inspirée par des étangs et servie par un joli texte en français, la musique laissant beaucoup de place à chaque membre du trio pour s’exprimer.

Bref, un trio à voir et écouter à la première occasion, sans cette configuration ou étendu au quartet quand le pianiste attitré (Jules Le Risbé) sera revenu de sa tournée internationale... au casino du Grau-du-Roi ! On espère qu’il ne va pas trop longtemps « traîner sur la grève » (allusion garantie sans lien avec les gilets jaunes...).


www.naimaquartet.com
(l’album autoproduit est en vente sur le site, en numérique et en CD)