Du jazz plus ou moins aventureux en quatre disques
Bmc Records
Aki Takase : piano
Daniel Erdmann : saxophones soprano et ténor
Carlos Bica : contrebasse
Dag Magnus Narvesen : batterie, percussions
Vincent von Schlippenbach : platines
Invités :
Nils Wogram : trombone
Alexander von Schlippenbach : piano
Aki Takase a une vie musicale bien remplie et rien ne semble pouvoir l’arrêter. C’est très bien ainsi d’ailleurs et ce n’est pas ce nouvel album qui démentira nos propos. « Forte », son titre, définit bien l’album dans son ensemble car l’énergie est au rendez-vous. Avec ses complices, elle propose une musique flirtant avec l’avant-garde mais qui aime à lorgner du côté des fondamentaux de manière plus ou moins explicite. Une chose est certaine, son travail est constamment expressif et empreint d’un je ne sais quoi de joyeux, de très naturel, qui fait la différence. Elle possède cet art particulier de construire des musiques complexes, presque foutraques, qui s’écoutent avec une grande facilité tant les lignes des structures demeurent claires en toute circonstance. Armée d’une maturité juvénile indestructible, la plus allemande des japonaises est une créatrice qui ne cesse d’avancer, sans œillère aucune, et qui reste plus que jamais pertinente à la proue d’un bateau jazz assoiffé de nouveaux paysages.
Sunnyside Records
Noah Haidu : piano
Buster Williams : contrebasse
Billy hart : batterie
Inconnu chez nous ou presque, le pianiste Noah Haidu est réputé outre-Atlantique pour sa capacité à composer des thèmes particulièrement originaux, ce qui ne l’empêche pas d’aimer jouer les standards. Il dit d’ailleurs que cela fait partie intégrante de sa vision artistique et que dans le cadre de cet album « trouver ma propre voix sur un standard simple et sans fioritures était une entreprise rare et nécessaire ». Dont acte. Tout en retenue, il ne joue que les notes essentielles et laisse beaucoup d’espace à sa rythmique dans un interplay en tout point épatant. Il faut dire également que les deux musiciens légendaires qui l’accompagnent, Buster Williams et Billy Hart, se côtoient maintenant depuis au minimum un demi-siècle et qu’ils ont, comme on dit, fait leurs preuves et l’histoire du jazz avec. La musique présente sur ce disque est celle d’un vrai trio, pas une rencontre opportuniste dans un studio, et elle coule avec une telle évidence qu’à l’écoute on se régale de voir comme l’originalité pianistique du leader se fond dans l’univers rythmique des deux cadors qui le soutiennent et l’enrichissent. A découvrir plus vite que ça.
Cuneiform Records
Tomeka Reid : violoncelle
Jason Roebke : contrebasse
Mary Halvorson : guitare
Tomas Fujiwara : batterie
Bienvenue chez les explorateurs… Avec son quartet de cadors du jazz ultra contemporain, Tomeka Reid propose un disque conçu comme une suite et d’un accès aisé si vous voulez bien pénétrer ses entrailles sans vous poser de questions. Sinon, il est plus que probable que vous souffriez le martyr. L’un des particularités de ce disque est que, bien souvent, il est difficile de repérer l’arrière et l’avant plan tant le jeu de chaque musicien est intriqué dans celui des ses collègues. Entre les phases à proprement parler exploratoire (qui peuvent paraître absconses) quelques moments plus mélodiques peuvent surgir (ou non) et surprendre. Le quartet de Tomeka Reid n’est pas là pour vous faire swinguer mais bien pour agiter vos neurones en suscitant l’intérêt à chaque instant. L’important est qu’une fois accoutumé sa vision musicale, tout vous semble évident, ce qui est la marque évidente d’un talent hors norme. Comme en sus elle est accompagnée par des musiciens de son acabit, le résultat est bluffant.
Jazz Eleven
Lukmil Perez : batterie
Irving Acao : saxophone
Carlos Sarduy : trompette (2.3.5.7.8
Raynald Colom : trompette (1.4.6)
Felipe Cabrera : contrebasse
Nolsen Ortega Sanchez : percussions (3)
Chucho Valdes : piano (5)
Installé en France depuis belle lurette (sinon plus), Lukmil Perez s’est fait, et se fait toujours, remarquer auprès des meilleurs. Pour la première fois sur disque en leader (à moins que l’on est raté quelque chose), il rend hommage à son pays natal sans tomber dans le piège du folklore nostalgique. L’écriture et les arrangements sont parfaitement jazz et comme ils sont joués de façon remarquable par des musiciens de haut vol, on ne s’ennuie jamais à l’écoute de ce disque atypique. Même Chucho Valdès fait une apparition sur un titre, ce qui donne une idée juste de la pertinence du projet. Une belle façon de mettre en avant ses racines cubaines, sa famille, en proposant une musique attrayante et plus qu’agréable à écouter.