Une sélection éclectique des publications discographiques du début d’automne 2007. Des rééditions majeures et des nouveautés diverses...
__degrade.png__
> HatOLOGY 610 - réédition - distribution Harmonia Mundi
Anthony Braxton : saxophones alto et soprano, clarinette et clarinette contrebasse / Ray anderson : trombone, trombone alto et petits instruments / John Lindberg : conterbasse / Thurman Barker : percussion, xylophone et gongs.
Enregistré au festival de Willisau (Suisse) le 1er septembre 1979.
Ce quartet faisait suite aux précédents avec Dave Holland (contrebasse), Barry Altschul (batterie, percussion) et Kenny Wheeler (trompette, bugle) auquel succéda George Lewis (trombone). Une formation rénovée où le trombone de Ray Anderson apporte une touche débridée qui rompait avec un certain intellectualisme perceptible chez George Lewis. Ce disque est la restitutuion du concert donné le 1er septembre 1979 au festival suisse de Willisau. Les deux parties de 32 et 34 minutes rassemblent sept compositions du saxophoniste-compositeur (à moins que ce ne soit l’inverse ?) désignées, comme toujours chez Braxton, par codes chiffrés accompagnés de graphiques pseudo-mathématiques.
Le concert débute par un ostinato oppressant un rien mécanique sur lequel vocalise le soprano de Braxton. Lentement, la musique évolue en séquences où les moments d’improvisation contastent avec des éléments écrits mêlant, dissociant, opposant habilement les différentes voix.
Après 28 ans, on a plaisir à retrouver cette musique qui n’a rien perdu de sa richesse. L’équilibre entre l’héritage des musiques afro-américaines et une écriture contemporaine infusées à travers les filtres de l’AACM est totalement réussi. En s’entourant d’une jeune équipe prête à toutes les expériences, Anthony Braxton s’exprimait alors avec une liberté et une fantaisie tout à fait réjouissantes. Si John Lindberg et Ray Anderson maîtrisent un discours virtuose et inspiré, c’est la prestation de l’excellent Thurman Barker à la batterie qui apparaît souvent comme un élément déterminant dans ce concert "historique".
> Liens :
__4__
> HatOLOGY 635 - réédition - distribution Harmonia Mundi
Mike Westrbrook : piano, compositions, arrangements / Tony Marsh : batterie / Steve Cook : basse / Brian Godding : guitare / Dominique Pifarely : violon / Georgie Born : violoncelle : Chris Biscoe : saxophones alto, soprano, baryton, piccolo, clarinette alto / Danilo Terenzi : trombone / Kate Westbrook : cor ténor, piccolo, flûte en bambou, voix / Phil Minton : trompette, voix / Stuart Brooks : trompette, bugle.
Au début des années 80, on ne trouvait guère de festivals sans créations. L’arrivée de nouvelles sources de financement permettait à des musiciens de donner libre cours à leurs envies et de composer de nouvelles formations. C’est ainsi que Mike Westbrook eut, à plusieurs reprises, la possibilité de concrétise des projets variés. Par exemple, cet hommage personnel à Duke Ellington (dont on célébrait en 1984 le 10ème anniversaire de la mort) à la demande des festivals d’Amiens et Angoulême. Depuis, on a malheureusement délaissé en France ce compositeur, pianiste et "band-leader" britannique qui a largement contribué à la reconnaissance d’un jazz contemporain et populaire à la fois.
On Duke’s Birthday est une oeuvre inspirée par l’esprit d’Ellington plus qu’un réel hommage. Aucune composition du Duke n’était au programme de cette création basée sur une formation alliant cuivres et cordes, instruments acoustiques et électriques (la basse et la guitare). Les cinq compositions de développent autour d’un savant assemblage de thèmes qui prennent le temps de se développer (la plus courte dure 8’34). Une sorte de fresque impressionniste où une certaine idée de la musique du Duke prend forme dans un climat qui n’est pas sans évoquer les arrangements de Gil Evans. Cette fois, à la différence des autres créations de Mike Westbrook, les voix sont assez peu présentes et interviennent par touches bien dosées... mais non sans humour (les wha-wha évoquant les sourdines des cuivres !).
Une oeuvre à réécouter avec attention : elle en vaut la peine d’autant plus que notre Dominique Pifarely national y est tout à fait à son aise ! France-Angleterre : une longue histoire...
> Liens :
__4__
> Rude-Awakening / Studio Lakanal - 1DCD0035 / RA2011 - distribution Les indépendants / Mosaic Music
Kristoffer J. Rosing-Schow - sax / Aurélien Besnard - clarinettes / Patrice Soletti - guitare / Eric Chalan - contrebasse / Peter Bruun- batterie
enregistré en septembre 2006 à Montpellier.
Décomposé est le second album du groupe franco-danois Contrabande. Contrairement à ce que pourrait suggérer ce titre, la musique est ici solide et structurée autour d’un ensemble de compositions qui donnent à écouter une belle diversité de climats (avec de jolis titres) qui puisent des influences discrètes dans les courants du jazz et les cultures du Monde. Entre l’Essai 89 ou Les amants magnifiques dont la structure rythmique assez complexe et dense rappelle les travaux de Steve Coleman, l’orient esquissé dans Ocre et le final aux effluves diffuses de Caraïbes (Pas un mot mais de l’air), Contrabande réussit un équilibre recherché entre la rigueur des compositions et la liberté laissée aux improvisateurs. Dans ce groupe très homogène, on pourra apprécier plus particulièrement les associations sax/clarinette (qui ne sont pas sans évoquer le Sclavis de l’Imparfait des langues) et le travail du guitariste Patrice Soletti qui se caractérise par une maîtrise équilibrée mais très ouverte de son instrument au service de l’ensemble auquel il apporte des couleurs déterminantes.
Une formation qui mérite d’être découverte à travers ce nouvel album parfaitement enregistré par l’équipe des Studios Lakanal.
> Liens :
__4__
> A La Sauce Jazz - distribution sur www.georgescrebassa.com
Georges CREBASSA : saxophone ténor, soprano et alto, flûte, chant, sampling / Fred GIRARD : batterie / Jean-Philippe CAZENOVE : contrebasse / Duncan MORELLET : steel drums / David RICHARD : accordéon / + DJ Shaolin : effets et samples sur Sorrow
Mais pourquoi, Georges Crébassa s’obstine-t-il à chanter de la sorte ? Son disque précédent (L’échappée)laissait augurer un potentiel intéressant dans les pistes ouvertes par des alliages sonores originaux (steel-drums et accordéon...) mais celui-ci nous laisse de marbre avec sa poésie embrasée déclamée/chantée avec emphase et ses élans "saxophoniques" qui tournent un peu à vide. Nous n’en dirons pas plus : chacun ses goûts. N’hésitez pas à vous faire une opinion en écoutant le disque en ligne et en le commandant s’il est à votre goût...
> Lien :
__4__
> Unit Records UTR 4199 - distribution Abeille Musique
Lucien Dubuis : sax alto, clarinette basse et clarinette contrebasse / Roman Nowka : basse, guitare, voix / Lionel Friedli : batterie et ustensiles / + Dania Rodari : voix sur Princesse de l’Espace.
La Suisse, ses alpages, ses fromages et son jazz "crossover" version débridée voire débraillée, iconoclaste sans aucun doute. La musique de ce trio est du genre corsée, forte en goût. Le leader se donne à fond sur ses anches, affectionnant (comme son compatriote Jan Brönimann) la clarinette contrebasse et ses sonorités de didjeridoo. Testez donc l’écoute de ce Retour qui vaut le détour. C’est le troisième album de ce trio qui peut aller du hard-rock tendance punk (Sansara) au blues désarticulé (Ylano). Derrière cet aspect échevelé, on a ici une équipe de fins gaillards qui maîtrisent leur affaire !
Une fois encore, le label Unit Records se montre à l’écoute des courants les plus actuels du jazz helvétique.
> Liens :
__4__
> Unit Records UTR 4193 - distribution Abeille Musique.
La Suisse, ses alpages, ses lacs, les brumes du matin qui se diffusent au fond des vallées... C’est le pays natal de Yannick Délez, pianiste valaisan qu’on suppose admirateur des esthétiques du label ECM. Au point d’emmener son associée Chloé Lévy (new-yorkaise de naissance mais résidente suisse) enregistrer au Rainbow Studio d’Oslo où furent réalisés des disques mythiques du célèbre label munichois. C’est là-bas, tout au nord, qu’est né Leinicha. Le son est là, ample avec une belle dynamique, donnant toute sa densité à un piano qui sonne superbement. Des nappes de notes en volutes enveloppent la voix de Chloé Lévy qui s’envole dans les aigus, plane sur les graves à travers des mélodies souvent sans paroles.
Le duo fonctionne en parfaite harmonie. Les nuances sont totalement maîtrisées mais on pourra regretter que la voix ne s’appuie pas plus souvent sur des textes. Les onomatopées utilisées s’avèrent rapidement assez pauvres sur le plan de leurs composantes sonores. Nous retiendrons donc plus particulièrement les quelques textes chantés et improvisés comme Douze ou la version vaporeuse de My Funny Valentine, toute en retenue.
Chloé Lévy, une voix à retenir au pays de Susanne Abbuelh et Yannick Délez, un piano qui sait se faire envoûtant en rappelant parfois le Chick Corea des duos avec Gary Burton.
> Liens :